Michel Guérin, ?L?artiste ou la toute-puissance des idées?

Il y a eu des artistes avant que l’art se détache comme activité autonome et il y en aura encore – il y en a ! – après ce qu’il est convenu d’appeler “la mort de l’art” et qui n’est sans doute que la fin de son mythe ou le commencement d’une existence strictement profane. L’impossibilité où nous sommes, en tout cas, de superposer parfaitement, fût-ce pour une courte période donnée, l’art et l’artiste (un genre d’action et un type d’agent), est un des aspects du caractère trans-historiquement problématique de cette activité spéciale ne produisant ses règles que pour les interpréter librement, voire pour les incarner singulièrement, c’est-à-dire pour fabriquer avec autant d’exceptions. À l’origine de l’énigme durable se trouve à en croire Freud une figure de l’artiste en magicien, dévoué au plaisir et le procurant aux autres, apparentée psychologiquement à l’enfant et au “primitif”.