Une nouvelle direction à l'ArBA-EsA
Pour cette rentrée académique 2024-2025, nous avons le plaisir de vous annoncer une importante nouveauté. En effet, nous aurons l'occasion d'accueillir une nouvelle direction au sein de notre établissement à partir du 16 septembre. 
Ce changement marque le début d'une nouvelle ère pour notre communauté, avec des perspectives enthousiasmantes et des projets ambitieux pour l'avenir.
Nous tenons à remercier Mme Daphné de Hemptinne qui à travers deux mandats de direction, a porté, inspiré et guidé notre Ecole supérieure des Arts. Merci à elle pour son engagement et son dévouement qui ont marqué l'ArBA-EsA. 
Nous adressons également un accueil des plus chaleureux à la nouvelle direction, Mme Christine Bluard, qui apportera une énergie renouvelée et continuera à faire de l'académie un lieu joyeux et un lieu d'excellence. 

 

[Une note de Mme Christine Bluard ]

Note pour un projet pédagogique et artistique, portant sur la recherche et l’ouverture dans un cadre opérationnel existant, durable et joyeux

Le printemps 2024 a vu ressurgir à plusieurs reprises le rôle des académies dans l’histoire de la formation des artistes. L’information vient du continent africain et c’est plutôt intéressant. Kenya, Ethiopie, RDC, Sénégal, Ghana, Nigeria, Afrique du Sud, et j’en passe, reconnectent avec les artistes issus du monde académique et leur rendent hommage. Le modernisme qui a vu le jour dans les institutions académiques, on s’en souvient aujourd’hui à Venise et le marché de l’art se frotte les mains. Cette nouvelle invite à réfléchir d’emblée sur le rôle fondateur des académies dans le monde de l’art. L’Académie est de ces institutions que – avec raison – on secoue, transforme, questionne et que l’on habite, littéralement. L’ArBA-EsA n’y échappe pas et c’est tant mieux.

Le débat public forme des citoyens et transforme les institutions bien plus que des années de chantier, mais il est utile parfois de rappeler que l’émancipation n’est pas que révolution, elle repose aussi sur l’art de questionner les fondamentaux, de les interroger en les mettant à distance…

De nouvelles formes, des pensées, des savoirs, des pratiques s’épanouissent en dehors des cercles académiques et montrent aussi combien les décentrements sont nécessaires et à l’œuvre dans le monde de la recherche et des arts. L’ouverture à d’autres cultures, à d’autres esthétiques, des savoirs et des savoir-faire dépasse l’enseignement et le nourrit. 

Je propose donc d’articuler cette première note d’intention sur ces deux pôles complémentaires (fondamentaux et décentrements) et d’y ajouter le caractère collectif de l’expérience d’enseignement (qui implique étudiants et enseignants). 

Je propose aussi de se donner le temps pour écrire ensemble un projet pédagogique et artistique concerté, réaliste et soutenable. 

Rhizomes et réseaux, un terrain fertile … 

L’intelligence collective est utile et nécessaire pour préparer le terrain qui ouvre et accueille des étudiants et déjà citoyens, un terrain qui soit aussi en bonne partie préparé, travaillé mais pas figé (un atout des jardins pas trop domestiqués) : laisser de l’espace pour la sérendipité, cette conjonction d’un hasard heureux et de l’opportunité d’en faire quelque chose, clé qui accompagne tout projet en train de se faire. 

La raison d’être d’une école supérieure d’art pourrait être cet « écosystème » en rhizomes qui donne de la valeur à l’existant et au potentiel, se nourrit du local et du global, de transversalité et de bottom up. Le décentrement est au cœur des réseaux et la recherche en est le fondement – car artistes et chercheurs sont de mèche.

A dessein, je choisis l’image du rhizome pour évoquer le réseau, il a pour fonction (naturelle) d’aérer le sol, favorise la stabilisation des berges et nourrit les espèces souterraines. C’est bien ce qu’on demande à un réseau : donner de l’inspiration et de l’air ; stabiliser, éprouver les productions et les nourrir. A l’opposé d’une identité qui centralise, la valeur ajoutée d’une académie et école supérieure artistique pourrait être de dessiner ce réseau – d’en tracer le potentiel. Et s’il faut chercher une identité pour cet espace de travail et pour son écosystème (étudiants/enseignants/chercheurs/professionnels), ce pourrait bien être celle de ne pas en avoir, et d’essaimer : un écosystème pour les pratiques culturelles qui nourrit et respecte la diversité. En d’autres mots, une plateforme ouverte (un campus) qui fédère les projets. 

… et un CAMPUS populaire, terrain fertile pour la recherche, l’académie pourrait être aussi partenaire, un « campus » où l’excellence ne se mesure pas (seulement) aux connaissances académiques mais aux savoirs décentrés, « situés », minorisés, populaires et héritiers de la post-mémoire. Le bottom-up y est bienvenu. L’esthétique relationnelle, l’approche participative sont autant de manières de proposer, diffuser, constituer du savoir. Il y a là l’idée de développer une pensée agile, qui envisage l’histoire dans la chronologie de ce qui a été et dans le même temps du potentiel de ce qui aurait pu être, cela éloigne du dogmatisme et engage de nouvelles préoccupations. Se rappeler toujours qu’il n’y a pas une, mais des histoires de l’art. La diversité des approches, la porosité offrent un remède à la morosité. La culture contemporaine semble ne pas avoir de frontière ou d’état. Les cartes sont rebattues, redistribuées. Et c’est tant mieux. 

L’objectif d’une note est d’être utile, joyeuse et potentielle, d’ouvrir le champ des possibles. Elle instille ou plutôt distille des doutes, essence de la réflexion, mais aussi du désir qui en est le carburant. C’est là le début d’une histoire. 

Je suis heureuse et fière de rejoindre l’ArBA-EsA.

Septembre 2024
Christine Bluard

 

[biographie] 
Christine Bluard

Bruxelloise, archéologue de formation, elle a travaillé dans plusieurs institutions muséales dont l’AfricaMuseum à Tervuren où elle a coordonné le programme des résidences d’artistes. En tant que muséologue et commissaire d’expositions, elle s’intéresse au processus de décolonialité des institutions et développe des projets d’expositions qui font la part belle à l’art contemporain et aux artistes – en particulier des artistes du continent africain et d’ascendance africaine. En septembre 2024, elle prendra la direction de l’ArBA-EsA, Bruxelles. 

 

 

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Photo de Christine Bluard
Photo de Christine Bluard